olives (JP ROGER)

L'histoire de l'olivier

Son fin feuillage vert argenté signe les paysages méditerranéens, mais ses racines historiques restent discutées : une équipe internationale de chercheurs apporte un nouvel éclairage à l'histoire complexe de l'olivier, situant l'origine de sa première domestication au Proche-Orient.

La mythologie grecque voudrait que l'olivier (Olea europaea) soit le fruit d'une querelle entre Athéna, déesse de la Sagesse et de la Science, et Poséidon, dieu de la Mer...Toutefois, si l'on s'en tient à une explication plus rationnelle, la question qui divise aujourd'hui les scientifiques est de savoir où s'est produite la domestication de l'olivier cultivé. Cette connaissance est en outre d’un intérêt tout particulier pour les historiens des premières civilisations méditerranéennes mais aussi pour les agronomes.

"Bien que l'exploitation précoce et l'utilisation des oliviers sauvages (oléastres) ait été documentée depuis le Néolithique du Proche-Orient à l'Espagne, il est généralement admis que la domestication de l'olivier a commencé au Proche-Orient il y a environ 6.000 ans", relèvent les auteurs d'une nouvelle étude publiée récemment dans la revue Proceedings de la Royal Society britannique. Cependant, selon plusieurs études antérieures, la domestication de l'olivier cultivé a pu se produire simultanément dans l'ouest du bassin méditerranéen.

L'équipe conduite par Guillaume Besnard (Laboratoire Evolution et Diversité Biologique, Toulouse - Imperial College London) s'est efforcée de démêler l’histoire ancienne des oliviers sauvages, puis d'en déduire les origines de la domestication de l'olivier cultivé. Les chercheurs ont ainsi étudié le génome chloroplastique (qui est exclusivement transmis par la mère) de près de 1800 oliviers sauvages et cultivés. Ils ont pu identifier trois lignées d'oliviers sauvages, qui se sont diversifiées au Quaternaire, bien avant les dernières glaciations.

Entre la Syrie et la Turquie

"Selon notre étude, l'origine maternelle de la plupart des oliviers cultivés d'aujourd'hui (environ 90% des variétés) est clairement au Proche-Orient", a déclaré Guillaume Besnard à l'AFP. Les chercheurs situent plus précisément l'origine de la domestication au Nord Levant, région frontière entre la Syrie et la Turquie. "De plus, on sait que la région du Nord Levant a vu l'émergence d'une civilisation importante au Néolithique, qui aurait activement domestiqué de nombreux organismes", a souligné le chercheur.

Selon ce scénario, cette première domestication à l'est de la Méditerranée a été suivie d'une colonisation de tout le bassin méditerranéen, parallèlement à l'expansion des civilisations et des échanges dans cette partie du monde. "Les données archéologiques qui attestent d'une exploitation de l'olivier à l'ouest de la Méditerranée durant l'Holocène sont évidemment tout à fait sérieuses", a relevé Guillaume Besnard. Mais selon lui, "il est fort probable qu'il s'agissait de l'exploitation d'oliviers locaux, sans doute sauvages ou peu domestiqués, qui ont ensuite été remplacés par des oliviers agronomiquement plus intéressants provenant de l'Est, puis de formes hybrides".

Cette histoire est difficile à retracer car l'olivier est particulièrement habile à brouiller les cartes des biologistes : en effet, au côté de l'olivier cultivé et de son ancêtre l'oléastre, on trouve aussi des formes sauvages, qui sont en fait des oliviers cultivés redevenus sauvages... Il n'en reste pas moins l'arbre le plus emblématique de la Méditerranée et du climat méditerranéen.

Force, sagesse, longévité, gloire, abondance... Depuis la Grèce Antique, lorsqu’Athéna le fit sortir de terre, la symbolique associée à l'olivier a accompagné l'histoire des civilisations. Sur le drapeau de l'Organisation des Nations Unies, la couronne de rameaux d'olivier symbolise aujourd'hui la paix. L'olivier, c'est aussi une production européenne annuelle de quelque 2,4 millions de tonnes d'huile d'olive, l'Espagne étant le plus important producteur mondial.

vm (pour l'AFP)